consentement belle mere

Comment faire comprendre le consentement à ma belle-mère ?

Une chronique pour Moteur de recherche dans laquelle je discute de consentement.

Notre auditeur Martin Desmarais pose la question suivante : 

Dans ma famille, la blonde de mon père se pend au cou de plusieurs personnes, elle flatte les gens, veut faire des massages, etc. On a beau lui dire qu’on a une bulle, qu’on n’aime pas ça, mais rien n’y fait; elle recommence. Et plus elle boit, plus elle devient collante. Qu’est-ce qu’on fait avec ces gens-là pour mettre notre limite?

J’aime cette question pour plusieurs raisons : 

  • On ne parle pas ou très peu souvent des femmes qui ne respectent pas le consentement et qui posent des gestes qui sont problématiques. Cela dit, c’est normal puisqu’il s’agit d’une majorité d’hommes qui vont poser ces gestes et agresser sexuellement;
  • On touche ici à deux éléments qui participent à la difficulté d’installer le consentement, soit : la consommation d’alcool et la banalisation des gestes à caractère sexuel; 
  • Sans oublier l’aspect des liens familiaux qui est important, car les violences sexuelles, incluant les gestes et attitudes déplacés, prennent souvent place dans un contexte intrafamilial. 

J’ai envie de proposer un mini-guide « Comment faire comprendre le consentement à ma belle-mère 101 » pour aider Martin à se sortir de cette situation peu évidente. Pour l’exercice, appelons-là Ginette. Mais d’abord, revenons à la base. 

Écouter la chronique audio.

Les piliers du consentement sexuel 

Je sais qu’on se fait bassiner avec la notion du consentement depuis des années maintenant, époque #MeToo oblige. Mais il est toujours bon de se rappeler de quoi il en retourne. Je propose d’utiliser le sigle CCLÉE qui sert aussi de truc mnémotechnique : 

Clair
Continu
Libre 
Éclairé
Enthousiaste 

Le concept de clé peut aussi être utilisé pour se rappeler la notion d’espace personnel. Lorsqu’on donne sa clé de maison, on le fait habituellement avec un nombre restreint de personnes et, de plus, ce sont des personnes de confiance. Cependant, même si on invite de la famille ou des proches chez soi, certaines règles sont mises en place pour conserver votre intimité. À moins que vous ne soyez très ouvert.e.s et à l’aise, Ginette ne devrait pas aller fouiner dans votre table de chevet où se trouvent, peut-être, certains jouets intimes. 

Aussi, rappelons-nous que l’alcool n’est JAMAIS une bonne excuse. 

Le consentement: une question de besoins et de limites

Si Martin n’avait pas d’abord nommé son malaise, je suggérerais à toute personne de d’abord s’assurer que ses besoins et ses limites sont clairement été établies. Ça peut paraître simple, mais pour beaucoup de gens, ce n’est pas évident à faire, car cela demande une bonne dose de confiance en soi. Mais si on simplifie, ça peut se décortiquer ainsi :  

  • nommer son malaise et le pourquoi du malaise (limite);
  • se réapproprier son espace personnel et s’assurer que celui-ci soit respecté (besoin).  

On peut y aller avec une comparaison claire pour faire comprendre ce que l’on vit à la personne qui ne respecte pas nos limites. Un peu comme on le fait avec les enfants. En utilisant une limite que la personne a déjà très clairement indiquée, cela peut aider à lui faire comprendre que jouer avec celle-ci est problématique. Prenons un exemple cliché; imaginons que la personne envahissante – Ginette – est responsable de la bouffe. Pour elle, la cuisine est un espace sacré. Quand elle popotte, que personne ne vienne l’envahir dans son espace, parce que ça va mal aller ! En utilisant quelque chose qui vient la toucher directement, il y a des chances qu’elle soit plus à l’écoute et saisisse le parallèle. L’humour est souvent une belle avenue, également. 

Communiquer de façon non-violente 

Je propose souvent d’utiliser la communication non-violente. C’est une façon de faire comprendre efficacement les effets que peuvent avoir un certain comportement et, surtout, ce qui est attendu comme changement. On pourrait donc y aller avec les 4 étapes de cette technique, soit : 

  1. Amener des faits observables (ex. : Quand on est en famille et qu’il y a de l’alcool, je remarque qu’il y a plus de gestes tactiles, des massages, etc.)  ;
  2. Nommer ce qu’on ressent face à cela (ex. : Ça me rend mal à l’aise quand on entre dans ma bulle ou qu’on me touche sans me le demander);
  3. Lier ce ressenti au besoin non comblé (ex. : Je serais plus à l’aise qu’on ne me touche pas ou que l’on me demande avant de faire ce genre de geste);
  4. Effectuer une demande claire et négociable (ex. : Accepterais-tu de faire plus attention à tes gestes, particulièrement quand il y a de l’alcool impliqué ? ). 

Évidemment, c’est un simple exemple qui peut s’adapter selon la personne à qui l’on s’adresse. Mais la formule est là et elle peut aider à mieux se préparer et exprimer ce que l’on ressent. De façon générale, on veut juste s’assurer que les besoins et les limites ont été clairement nommés et bien compris. 

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Changer la honte de camp

Toutefois, dans le cas de Martin, la situation a été abordée à plusieurs reprises. C’est là où l’on doit se rappeler que ce n’est pas lui qui est responsable de la situation. Bien sûr, on veut offrir la chance à Ginette de s’expliquer, de réajuster le tir, de s’améliorer, mais si les comportements ne changent pas, on doit lui remettre la responsabilité sur les épaules. C’est elle qui crée le malaise et qui rend les gens inconfortables. Ce n’est donc pas à sa famille de continuellement s’adapter et vivre dans la gêne et la honte d’être aux prises avec cette situation. 

S’unir et intervenir 

D’après les dires de Martin, plusieurs membres de la famille ont fait part de leur malaise, sans que cela affecte Ginette. Il pourrait être judicieux de se concerter pour faire une action de groupe. Si on trouve que d’intervenir en groupe est un peu trop intense, on peut aussi nommer un.e porte-parole pour expliquer que des limites ont été franchies et que les choses doivent changer. Cela pourrait aussi donner l’occasion à certaines personnes de s’exprimer sur le malaise ressenti et sensibiliser des membres de la famille qui sont moins au fait de ce qu’implique le consentement. 

Cela peut être une occasion de discuter de consommation d’alcool et de faire part de vos inquiétudes face à cela. Comme la consommation d’alcool semble liée à une forme de désinhibition de la part de Ginette, l’intervention peut tout à fait inclure cet aspect. Ça peut passer par la sensibilisation au fait que tout le monde ne ressent pas la même aisance avec l’alcool. Certaines personnes sont très à l’aise dans des situations alcoolisées tandis que d’autres pas du tout. Des gens ressentent une certaine euphorie en consommant tandis que d’autres peuvent être plus déprimés, mal à l’aise, etc. Tout le monde n’a pas la même tolérance à l’alcool non plus et c’est un élément à tenir en compte quand on consomme dans un contexte social avec diverses interactions. On peut aussi simplement rappeler à la personne que de trop consommer n’est tout bonnement pas bon pour sa santé. 

Sanctionner

C’est vraiment plate, mais parfois, on a pas le choix. Si Ginette ne réalise toujours pas ce qui se passe ou refuse de changer quoi que ce soit, il faut agir… ou accepter qu’elle ne change pas. Je parle de sanctions, car celle-ci doit comprendre qu’il y a des conséquences à ses actions. Cela peut prendre plusieurs formes comme :  

  • Verbaliser fermement, devant les autres, qu’on refuse ce genre de comportement; 
  • Nommer que l’on va quitter l’endroit où se passe l’événement social en cours, si le comportement ne change pas;  
  • Mettre des limites à la consommation d’alcool de Ginette;
  • Refuser des invitations où elle est présente, s’il y a de l’alcool;
  • Refuser des invitations où elle est présente; 

Je suis bien consciente que cela demande une bonne dose de courage. Il faut parfois en venir là pour rétablir la situation. Il ne faut pas oublier que c’est une question de respect et d’intégrité physique et émotionnelle. C’est votre droit d’être à l’abri de ce genre de situation. Je le répète : ce n’est pas votre faute! Vous n’avez pas à porter le blâme, la gêne, la honte, l’exaspération, etc. qui vient avec ce type de comportement. 

S’appuyer sur des ressources 

Évidemment, il existe aussi plusieurs ressources pour obtenir de l’aide. Pensons à Éduc’Alcool, Drogue Aide & Référence pour ce qui est des comportements problématiques avec la consommation de substances. Il y a également de nombreux sites gouvernementaux et d’organismes qui expliquent très bien le consentement. Sans oublier des programmes de prévention comme Mes Choix Alcool, créé par Educ’Alcool, pour les personnes qui rencontrent des enjeux liés à la consommation d’alcool. 

Photo de une : Helena Lopes

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