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Porno : quelles sont les préférences chez les hommes et les femmes?

Une chronique pour Moteur de recherche dans laquelle j’analyse la consommation de porno des hommes et des femmes.

Un auditeur de l’émission nous demande :

« Pas que ça ne me soit jamais arrivé, oh que non! Je demande ça pour un ami: pourquoi des mâles homo sapiens aiment regarder des scènes de sexe entre femmes? Et l’inverse est-il aussi répandu? Je sais que certaines femmes aiment regarder des scènes de sexe entre hommes. Mais est-ce une activité aussi prévalente que chez leurs collègues masculins? »

Jean-Pierre Guay, auditeur de Moteur de recherche

J’ai voulu élargir la question. Je propose donc à Monsieur Guay de décortiquer les habitudes de consommation de porno chez les hommes et les femmes. Mais avant tout, petit tour d’horizon de la pornographie grand public en 2023.

Traumavertissement : je reprends des termes crus utilisés dans la pornographie. J’utilise les mots hommes/femmes ainsi que féminins/masculins afin de reprendre ceux utilisés dans les études citées. Celles-ci sont majoritairement effectuées sur des personnes hétérosexuelles et cisgenres. 

Écouter la chronique audio.

Populaire porno 

Chaque année, les grands joueurs du domaine, comme Pornhub et xHamster, effectuent des rapports de performance. Ceux-ci permettent de voir que les contenus pour adultes sont plus populaires que jamais. Ils nous donnent aussi de bons indices sur les tendances adoptées par le public ainsi que les préférences de celui-ci. 

Le site de ventes de jouets sexuels SexualAlpha s’y met également. Selon ce site, les trois plateformes pornographiques les plus populaires dans le monde sont Pornhub, XVideos ainsi que XNXX. Celles-ci combinent un total de 5.81 milliards de vues par mois. Pornhub, dans son rapport annuel de 2022, explique que, globalement, 36% des personnes qui visitent le site sont des femmes. Au Canada, les elles représentent 29% de la clientèle.

On ne peut passer sous silence la fulgurante popularité de OnlyFans. C’est le joueur qui est venu changer la donne dans la consommation de porno. D’après TechReport, 98% du contenu présent sur la plateforme est dédié à des contenus pour adultes. Les utilisateurs.trices sont largement masculins (87%), tandis que 10% sont des femmes et 3% n’ont pas spécifié leur genre. Le site de conseils de dating, Maze of Love, met aussi la main à la pâte. Il propose un survol de plusieurs études sur la consommation de porno. On y apprend, entre autres, qu’un téléphone intelligent sur cinq contient des requêtes liées à la recherche de contenu pornographique. 

Au Canada, selon Pornhub, les mots-clés les plus recherchés en 2022 sont : milf (mother i’d like to f*), lesbian, hentai, asian, threesome. Les recherches vont plutôt vers : girl with two vaginas, naked women, trans f* guy et real sex party.

La porno, entre les hommes et les femmes 

Bien sûr, on analyse aussi les habitudes de consommation selon le genre. Dans The Porn Gap: How is Pornography Impacting Relationships Between Men and Women Today? réalisé conjointement, en 2021, par The Weathley Institution et l’Austin Institute, on découvre qu’un homme sur quatre cache activement sa consommation de pornographie à sa partenaire. En effet, il y a encore énormément de honte et de gêne associée à cela. On divise aussi la pornographie en trois catégories distinctes, soit :

  • Porno légère (soft porn) : sexualité simulée et nudité partielle, sans gros plan ou action ciblée sur les organes génitaux;
  • Porno explicite (hardcore porn) : vraies relations sexuelles, accent mis sur la nudité et la représentation des actes sexuels en détail;
  • Porno extrême (extreme porn) : contenu pour adultes avec, par exemple, violence, absence de consentement, sexe de groupe, etc.

En comparant la consommation par semaine versus par mois, l’équipe de chercheuses et chercheurs a réalisé que les hommes sont plus susceptibles de consommer ces trois types de porno chaque semaine. 45% des femmes sondées regardent des contenus explicites et extrêmes une fois par mois ou moins. 

Des expériences qui divergent

Une autre étude longitudinale, réalisée de 2015 à 2017 et publiée dans la revue Psychological Medecine, a joint plus de 100 000 participant.e.s francophones et près de 4000 couples hétérosexuels. Les résultats démontrent que les hommes regardent plus de pornographie explicite/paraphilique* et moins de pornographie légère/grand public que les femmes.

Fait important, l’étude rapporte des effets différents chez les hommes et les femmes. Chez les jeunes hommes, la porno « [amène] des doutes sur leur compétence sexuelle, une  détérioration de leur fonction sexuelle et de la satisfaction chez leur partenaire sexuelle ». Chez les jeunes femmes, c’est l’effet inverse : augmentation du sentiment de compétence, amélioration de la fonction sexuelle et de la satisfaction du partenaire. 

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Ce que l’on consomme

Si l’on revient à Pornhub, on retrouve, dans sa revue de l’année 2022, des thématiques populaires appréciées selon le genre. L’année dernière, le top 1 des catégories recherchées chez les hommes était japanese et, du côté des femmes, lesbian. Les autres catégories populaires durant l’année : ebony porn (porno avec personne noire), reality (réalité), outdoor (plein air) et babysitter (18+) (gardienne d’enfants 18+). 

Les femmes apprécient les contenus de type scissoring (les fameux ciseaux), solo male (masturbation masculine en solo) et p* licking (sexe oral sur une vulve). Elles sont également friandes de porno gaie, constituant près de la moitié (46.7%) des gens qui consomment ce type de contenu. Ajoutons qu’elles sont aussi amatrices de la catégorie threesome (trip à trois). 

Selon un article de Vice, ce choix d’aller vers la porno homosexuelle s’explique, entre autres, par le fait que le corps masculin est plus mis de l’avant. Contrairement aux contenus hétérosexuels qui privilégient les gros plans d’organes génitaux. On y parle même de « pénis désincarné », puisque le membre est montré à part, comme une entité qui agirait seule. 

Il y a aussi la porno éthique/féministe qui se fait connaître de plus en plus et qui répond à certaines attentes des femmes. On y reviendra dans une prochaine chronique.

Comprendre les motivations 

Pour revenir à la question initiale de notre auditeur, on peut donc dire que : oui, les femmes sont aussi adeptes de porno qui montre la sexualité entre hommes que les hommes qui regardent de la sexualité entre femmes.  

Cependant, les deux sont faits pour des raisons fort différentes. Que les hommes soient portés vers les scènes de sexe entre femmes s’explique par le fait qu’ils sont éduqués dans le male gaze ou regard masculin. Pour le résumer très brièvement, les contenus culturels sont influencés par une « culture visuelle » qui amplifie les éléments qui plaisent au regard masculin. Par exemple, l’histoire de l’art au complet est remplie de femmes dénudées pour le plaisir de ce male gaze. Les films et séries télévisées n’y ont pas échappé. On ne s’étonne pas, alors, de voir les hommes s’émouvoir (ou s’émoustiller #jai80ans) devant des images de femmes sexualisées. Ce sont les représentations qu’ils ont été habitués à considérer comme excitantes. Mettez deux femmes (ou plus) ensemble et ce regard se multiplie. Donc, plus d’excitation. 

Et les femmes…

Pour les femmes, l’intérêt pour la porno homosexuels ou d’hommes entre hommes s’explique aisément. Elles peuvent y trouver plus à voir que dans les films pornographiques hétérosexuels, mais elles ont aussi l’occasion d’apprécier une sexualité dans laquelle elles ne sont pas objectifiées. La sexualité y est aussi plus incarnée;  on y montre le désir, l’entièreté des corps, l’excitation, etc. Il ne faut pas oublier que le consommateur #1 de la pornographie est masculin; on veut lui faire plaisir, le montrer sous un beau jour. 

Ultimement, la pornographie demeure le reflet de notre société, de nos stéréotypes et de nos désirs et envies, qu’ils soient ouvertement discutés ou cachés… 

*Paraphilie : fantasmes ou comportements sexuels fréquents et intenses portant sur des objets inanimés, des enfants ou des adultes non consentants ou bien impliquant la souffrance ou l’humiliation de soi-même ou de son partenaire. (Merck Manuals)

Photo de une : Philipp Lavra

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